Pause culture

 


Contribution
du Prof. Dr. Gonzague Loumintope, chercheur en linguistique
comparée et chimie pneumatique à l’institut de géo-ingénierie de l’université de Kingstown (Barbade).

 

 

 

Bien des gens se questionnent sur l’intérêt du latin. Pourquoi, par exemple, le Robert 2003 s’ingénie-t-il, avec sa morgue propre, à nous signifier que le nom masculin punching-ball (\pœn.tʃiŋ.bol\) provient du bas-latin punchum, « l’alcool traitre », et Boli, « À jamais les premiers » ?

Eh bien la raison en est simple : le latin fut des siècles durant une langue européenne véhiculaire indispensable et de nombreux termes aujourd’hui oubliés se peuvent être reconnus par le biais de leur racine, latine pour la plupart. La communication entre individus du même sol européen mais de langue différente peut s’en trouver par là même facilitée.

Un exemple tout simple : j’étais pas plus tard que plus tôt pour des raisons professionnelles à Budapest. Le hongrois étant une langue que j’ai délaissée il y a quelques années déjà au profit du bulgare, je me retrouvais comme deux ronds de flan devant la carte du grand restaurant dans lequel j’avais décidé de dîner en compagnie de Svetlana, charmante autochtone aux tarifs franchement intéressants discussions passionnantes.

Gonzague Loumintope dînant en compagnie de Svetlana.

Le serveur, jeune homme girond à l’acné bourgeonnante dont la sève frissonnait d’impatience à l’idée de franchir enfin un derme aux défenses affaiblies, semblait quelque peu s’impatienter devant mes tergiversations pourtant bien légitimes, je tentais de décrypter le menu, cherchant au cœur de celui-ci une langouste rôtie en carapace au beurre d’orange, marrons laqués à la confiture de quetsches- lorsque soudain me vint à l’idée de formuler ma requête en latin.

_ «  Habent locusta (locustămlocustāsad butyrum aurantiaco cum castaneis marmeladae caedit ? »

_ « Certum ! » se fit-il une joie de me répondre, un large sourire enluminant ce visage poupon et craquelant qui n’était pas sans rappeler les personnages de Fragonard, le sébum, sébumus, sébumoris en plus, même si ceci n’a pas beaucoup d’intérêt pour la suite de l’histoire. Je lui retournais son sourire avec complicité, puis après avoir commandé une bouteille de vinum rubrum à la robe aussi sombre que celle de ma compagnie d’un soir, j’entamais une conversation en bulgare avec mon interlocutrice qui ne parlait que le hongrois.
Voilà donc la raison pour laquelle les dictionnaires s’entichent de ces précisions de prime abord élitistes, pour ne pas dire passéistes, et si j’ai cité le Robert 2003 j’aurais également pu citer le Robert 2008, voire même le Larousse 2010, sans même mentionner le Littré ou encore le Vidal.

Si jamais vous deviez vous retrouver dans une situation linguistique fâcheuse, pensez malin, pensez latin !
Prenons un cas de figure classique. Dans le cadre d’une réunion vous croisez un publicitaire étranger qui cherche ses mots et semble vouloir coller ses affiches sur du mobilier urbain :

Français : Mobilier urbain sur lequel on peut coller des affiches
Latin : Abribus


Ce même publicitaire souhaite parallèlement distribuer des tracts à la sortie des églises, synagogues ou encore mosquées ? Rien de plus simple :

Français : Tract
Latin : Prospectus

 

Et ainsi de suite !
L’embarras linguistique est vaincu, la gêne lexicographique est à terre, l’obstacle langagier est mis à bas !

 

Dans ma prochaine contribution je vous parlerai de l’influence du premier concile de Nicée sur le développement des techniques de pêche à la truite en milieu ombraticole.

En attendant cette échéance je vous souhaite à toutes et à tous une agréable année 2019.

Latinement vôtre,

Professeur Loumintope.

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